Guillaume Burger privé de Jeux Olympiques

Jeudi dernier la France et ses athlètes participaient au Tournoi de Qualification Olympique (TQO). Représentant la France, Guillaume Burger s’est vu être privé de Jeux Olympiques après s’être sélectionné ! Invraisemblable, mais vrai.

Guillaume que la farce soit avec toi

Jeudi dernier commençait le Tournoi de Qualification Olympique destiné à distribuer les rares quotas encore disponible pour les Jeux Olympiques de Tokyo. Cette échéance est l’une des plus compliquées à aborder pour les athlètes tant elle une compétition couperet. C’est en quelque sorte une « pige » mais au niveau international. Dans la plupart des catégories où un quota était encore disponible, il fallait remporter la course ou, dans le cas du K1 1000m, terminer premier ou second.

© Matthieu Tourault

Comme on dit à Poudlard, Evanesco !

La suite relève de la science-fiction ou plutôt du burlesque. Guillaume Burger franchit les qualifications et les demi-finales. Auteur d’une course dantesque en finale, Guillaume Burger arrache la seconde place après une remontée impressionnante, dont lui seul a le secret. Un sans-faute donc de la part du français, qui lui permet de décrocher le Graal, sa sélection olympique. Mais c’était sans compter le coup de baguette magique de la FIC : Evanesco !

Coup de théâtre au bord du bassin. Guillaume Burger et la France sont informés que sa qualification est invalidée. Incroyable mais vrai, un athlète va peut-être se voir priver de son rêve pour une faute qui non seulement n’est pas sienne, mais ne relève pas non plus de la Fédération Française qui a proposé Guillaume pour cette course.

J’ajoute deux et je retiens 1. Combien de bonbons reste t-il ?

Pour les fautifs, la FIC, le problème remonte aux Championnats du Monde 2019 à Szeged. Là où la plupart des quotas olympiques ont été distribué. A ce moment-là la France aligne Etienne Hubert en K1 1000m ainsi qu’en K2 1000m. Peut-être parce qu’à ce moment-là, le camp tricolore ne s’attend pas à ce que le K1 comme le K2 obtiennent le quota sur chacune des deux courses. Mais peu importe quelque part. Dans tous les cas, ce qui est clair dans un océan d’opacité, c’est que la FIC a commis une faute grave en informant la France qu’elle pouvait être représentée sur le K1 1000m au Tournoi de Qualification Olympique et donc que Guillaume Burger pouvait faire cette épreuve.

Bien qu’il soit dans la tourmente, CKM a tenu à donner la parole à la principale victime de ce joyeux bordel administratif (oui ce n’est pas non plus bon pour l’image de notre sport auprès du CIO), Guillaume Burger.

Interview Guillaume Burger

Tu es passé dans un véritable rouleau compresseur que peu de gens peuvent imaginer. Comment vas-tu ?

Aujourd’hui j’ai juste envie d’aller aux Jeux Olympiques. Je suis au fond de moi convaincu que je serai à Tokyo, il ne peut pas en être autrement. J’ai remporté ma qualification l’autre jour et face à un manque de réponse rationnelle, c’est impossible que je ne puisse pas y être, à mes yeux. J’y crois beaucoup, je fais confiance à ma fédération et au CNOSF pour ce recours. Et de mon côté je suis prêt à me mobiliser pour que ça bouge et se résolve. J’ai besoin que ça redevienne une question de sport.

Je ne comprends pas.

© Matthieu Tourault

Juste après ma course j’étais dans l’euphorie totale. J’ai eu l’impression de transmettre une bonne vibe pour mes amis et compatriotes en équipe de France. Le lendemain j’étais le premier à pleurer. Mais je n’étais pas le seul. Et encore je parle seulement de l’Équipe de France. J’ai eu beaucoup de témoignages touchants de françaises et français qui n’était pas à Szeged. La loi du sport n’est pas du tout respecté et ça déstabilise tout le monde. François During, mon entraineur, est dévasté. Il est dans un abattement et une colère terrible. Lui aussi c’est son boulot. On a tout fait bien, on tourne toute notre vie la dessus pour au final, se prendre un mur sans comprendre.

Là où ça a été très dur, c’est que j’ai pris un mur avec cette invalidité le jour où la coupe du monde commençait. Pour certains, les sélections pour les Jeux Olympiques se finissaient à Szeged. Je pense notamment au K1 200m ou encore au K2 1000m. Pour ma part je devais encore être au plus haut niveau et c’était presque impossible après toutes ses émotions. Le clan tricolore en a probablement été aussi ébranlé. Depuis qu’on a quitté Szeged je me sens un peu mieux, je crois que j’ai besoin de quelques jours de repos pour débrancher autant que possible après tout ça.

Est-ce que tu sais ce que cela a suscité autour de toi ?

Le norvégien était le premier à venir me consoler. J’ai discuté avec des belges, des allemands. Et j’ai reçu beaucoup de messages, que ce soit le jeudi après la course ou le vendredi après le chaos. J’ai même eu un message de Martin Fourcade et de représentants d’athlètes.

Je me sens soutenu dans cette injustice. Soutenu par l’organisation du sport en France, par ma fédération et par mes proches.

Jusqu’à jeudi on pouvait voir que la France était autorisée à concourir pour le quota sur le K1 1000m. Que s’est-il passé pour que cela change a posteriori ?

Je ne sais pas comment c’est possible., je ne comprends toujours pas. C’est le secrétaire général de la Fédération, Simon Toulson, qui s’est adressé à moi. Il s’est excusé à plusieurs reprises d’avoir commis personnellement une erreur. Il n’aurait pas dû autoriser la France à courir sur cette course au Tournoi de Qualification. En d’autres termes je n’aurais pas du pouvoir courir.  Pourtant des preuves comme quoi on était autorisé par la FIC à courir, nous en avons (la FFCK).

© Bernadette Pouillaude

On sait que les règles sont obscures, mais j’ai envie de dire on peut y comprendre une logique entre les doublages mono et équipages qui rendent le décompte des tickets olympiques compliqué. Ce n’est pas toujours simple de tout comprendre, mais c’est au nom de l’équité donc c’est bien que ce soit ainsi. D’ailleurs lorsque la règle est respectée, les sportifs adhèrent sans sourciller à un règlement. Or là il n’a pas été respecté. 

Justement, on (FFCK) avait demandé par courrier si on avait bien le droit de courir. Il a été répondu que oui, la France était éligible.

La FIC a donc invité la France a participer au Tournoi. 

La réponse était claire. Non seulement on pouvait participer sur le K1 1000m mais en plus, si nous parvenions à qualifier le K1, cela permettrait d’aligner un K4 500m avec les trois athlètes déjà sélectionnés (K2 1000m et K1 200m + K1 1000m).

Aussi, a la veille de la course, lors de la réunion team leader qui réunit la France et tous les pays concernés, personne n’a rien eu à dire. Si une irrégularité avait été remarquée, n’importe qui aurait pu la signaler. Si on va plus loin encore, j’ai fait 2e  d’une course qui me qualifie pour les JO. Un juge a posé sa signature et validé cela.

© Bence Vekassy

Au ponton de la pesée, je me retrouve avec des membres de la FIC qui me félicitent et même un qui m’interview. Nous échangeons, micro et caméra branchée, pendant près de 2 minutes, où il me glisse ses félicitations et le « on se voit à Tokyo » qui résonne encore. 

Chipeur arrête de Chiper

Encore une fois mais là c’est mon avis personnel, lorsque l’on regarde la course aujourd’hui, pas une seule fois le speaker ne cite ne serait-ce que mon nom. Je trouve ça surprenant, presque surréaliste étant donné la configuration de fin de course et la sélection à la clé. 

Le plus dur pour moi c’est ça. La FIC essaie de camoufler son erreur, il me marche sur la gueule, en essayant de rayer mon nom et ma performance. Je crois que c’est surtout ça le plus intolérable. J’ai eu des excuses orales. Autant publiquement ils ne veulent rien reconnaître. 

On te sent anéanti, mais aussi combatif. Quelles sont les prochaines étapes ? Comment la fédération française se positionne-t-elle ? 

La fédération française me soutiens. On veut éviter de léser le norvégien. Sinon au lieu d’être moi, c’est lui qui en pâtira. Ce n’est pas le but, il n’y a pas de progrès là-dedans. On est en train de mettre en place un système pour que ce ne soit pas le cas et que ma qualification ne se fasse pas au détriment d’un autre athlète qui a lui aussi respecté les règles. C’est donc l’ICF et la FFCK avec on l’espère le soutiens de la fédération norvégienne, qui vont se mobiliser et faire un recours auprès du CIO

Tu risques dans tous les cas de ne pas avoir ton destin en main, en tout cas pas tout de suite. Au-delà de ton cas personnel expliques nous pourquoi c’est grave ce qu’il se passe. 

Je fais du sport passion. Il n’y a aucun enjeu monétaire. Pas de parcours professionnalisant non plus. Pour moi le sport de haut niveau c’est un jeu. On s’entraîne, on se prépare, on se conditionne parfois toute sa vie. Mais à la fin, on joue juste à la course. Si le truc le plus basique comme le règlement on ne le respecte pas, ça enlève tout le sens de la course sur le bassin, ou de ce qui se passe dans un stade d’athlé ou encore sur un terrain de foot. Ca n’a pas de sens.

#rendslequota

C’est grave parce que participer à un jeu équitable, c’est très intéressant. Pour les participants comme pour les spectateurs. Mais si les juges et arbitres sont capables de changer le cours des choses après la course c’est une toute autre histoire. Lorsqu’on réalise une performance qui remplit des critères de sélection, mais qu’elle n’est pas valide à cause d’une erreur administrative et personnelle, c’est insupportable. Ca vide de sens l’investissement de tous les sportifs de haut niveau. 

Le sport est vecteur de nombreuses valeurs et l’olympisme est censé être la représentation la plus exacerbée de ses valeurs. Amitié, respect et excellence.  Dans cet imbroglio stratosphérique, on se demande bien où est passé le respect de l’olympisme. Comment a été perçu ton message #respectathletes par les autres athlètes et autres nations ? 

Des témoignages j’en ai eu beaucoup. A titre d’exemple, je suis allé faire un échauffement en monoplace. il y avait déjà eu le hashtag qui avait été repris par des athlètes sur Instagram et Facebook. J’ai juste fait un hashtag sur un sticker à la place de mon nom. En une vingtaine de minutes7-8 athlètes m’ont crié leur soutiens en me croisant sur l’eau. Les juges sont venus moins d’une heure après pour dire que je n’avais pas le droit d’afficher un slogan politique. 

Alors je l’ai enlevé et j’ai demandé aux autres athlètes de retirer les stickers car contrairement  à la FIC nous, athlètes, respectons les règles. Le signe qu’ils nous ont envoyé c’est que nous n’avons pas le droit de demander le respect. Dans une situation comme celle-ci, on se sent méprisé par le système.

Quand on associe JO et canoë-kayak on pense à Tony Estanguet. Mais malheureusement, beaucoup se souviennent aussi, si ce n’est plus, du malheur Boccara /Boucherit qui était même devenu une blague de Stade 2 à l’époque. Est ce que tu trouves ça dommageable pour notre sport qui peine déjà à exister aux yeux du grand public ?

Je ne sais pas. Ce qui est par contre vrai, c’est le focus médiatique. 

J’ai fait vice-champion du monde, de multiples médailles de coupe du monde et régates internationales comme les Jeux Méditerranéens et Jeux Européens. Mais la fois où on parle le plus de moi, c’est pour une connerie comme ça. Ca je trouve ça dommageable et compliqué pour les athlètes issus de disciplines méconnues du grand public comme la nôtre.

#RESPECTATHLETES

Interview l’Equipe

Un commentaire sur “Guillaume Burger privé de Jeux Olympiques

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